

21 juillet 2021
Le Bond podcast - Esther, l'experte du batik ghanéen
PANAFRICA vous présente l'une de ses partenaires bien-aimées et talentueuses, Esther. Découvrez ses début au Ghana et ses sources d'inspiration hors du commun - On vous le promet, ça vaut le voyage !
Nos partenaires
Ils sont au cœur de notre manière de travailler. Nous travaillons main dans la main avec un réseau de partenaires sur le continent africain, du Burina Faso, Ghana et Côte d’Ivoire au Maroc. Plus qu’une simple collaboration, nous construisons des liens solides avec eux.
Fiers des étroites relations que nous avons forgées avec le temps, nous tenons à partager avec vous nos oulisses (achat des tissus, ateliers…) en commençant par la fabrication des tissus.
Aujourd’hui, nous vous emmenons avec nous dans le studio d’Esther, au Ghana.
Tu dois te rendre utile à quelque chose.
Elle nous accueille dans son atelier à Accra où elle produit du batik avec ses 4 employés.
Nous avons enregistré cet épisode durant notre dernier voyage au Ghana en janvier 2020. Tout en nous faisant faire le tour de sa boutique et de son atelier, Esther nous raconte son parcours, de ses débuts précoces, en passant par ses obstacles et ses sources d’inspiration hors du commun.

Hugues
Salut Esther !
Esther
Salut ! Bienvenu chez moi ! Comment allez vous ? Comment se passe votre journée ? Au Ghana, nous disons tout ça avant de commencer.
Hugues
Bien merci ! Donc là on est dans ta boutique ?
Esther
Oui. A Osu [quartier d’Accra] près de l’ancienne ambassade américaine. Nous avons une petite boutique ici, et le tissu que nous faisons à l’atelier, c’est ici qu’on le vend. On vend aussi des produits finis.
Hugues
Donc c’est là que tu vends tout ce que vous produisez ?
Esther
Oui. Et on vend aussi dans les bazars dehors.
Hugues
Et depuis quand est-ce que tu tiens cette boutique ?
Esther
Depuis 1994.
Hugues
Comment vont les affaires ?
Esther
Pas mal ! Il n’y a pas de quoi se plaindre ! C’est ce que je dis aux gens.
Hugues
Et tu travailles ici avec ta fille ?
Esther
Je travaille ici avec ma fille et deux couturières.
Hugues
Une affaire de famille !
[rires]
Esther
Une affaire de famille oui !

Esther
Donc là, nous sommes dans “l’Atelier d’Esther”. Et nous allons montrer comment faire le batik, un tissu artisanal.
Hugues
Quand as-tu commencé ?
Esther
Très tôt et difficilement. Tu sais, j’ai les enfants, je dois m’occuper d’eux. Tu dois beaucoup travailler pour les faire aller à l’école. Donc j’ai commencé par simplement vendre du batik.
Hugues
Ah, tu as commencé par en vendre ?
Esther
Oui. Puis un ami est venu et m’a demandé « T’as pas envie d’apprendre comment on le fait ? » et j’ai dit oui. Ensuite j’ai suivi une formation de deux semaines au Ghana. Après j’ai commencé à monter quelque chose. Mais avant ça, ma mère vendait ce tissu d’Abidjan que tu peux acheter, le wax.
Hugues
Ta mère vendait déjà du tissu ?
Esther
Oui. Et du wax je suis passée au batik. J’ai fait quelques essais. Beaucoup de personnes m’encourageaient à produire mon propre tissu. Donc après un an j’ai tout arrêté pour produire mon propre tissu. J’ai démarré dans un petit espace puis je suis venue ici. J’ai acheté ce terrain et j’ai commencé à développer mon business. A ce moment-là j’avais 3 enfants donc je devais lutter, m’occuper d’eux. C’est comme ça que j’ai commencé mon affaire.
Hugues
Et donc tu as commencé avec le batik ?
Esther
Oui j’ai commencé avec le batik. J’étais soutenue par les français, les allemands, les américains – à l’époque j’étais juste à côté de l’ambassade américaine. Ils me poussaient « fais-ci, fais-ça. Commence à enseigner… ». J’ai juste écouté et j’ai commencé à améliorer ma vie. Et je cherchais des idées pour l’améliorer davantage. J’ai aussi fait de lourdes erreurs – plus tu attends, plus tu as de chance d’obtenir quelque chose de mieux.
Hugues
Alors tu es une experte aujourd’hui ?
Esther
[rires] Oui, quelque chose comme ça. J’essaie en tout cas.
Hugues
Tu es connue comme l’experte ghanéenne en batik !
Esther
C’est comme ça que les gens m’appellent oui. Donc je fais de mon mieux pour faire quelque chose de significatif pour moi-même.
Hugues
Et c’est toi qui crées les modèles ?
Esther
Oui. A chaque fois que je vais en ville, je réfléchis beaucoup. Je me lève à l’aube et je me demande ce que je pourrais faire.
Si tu viens au magasin avec l’idée d’acheter quelque chose, tu cherches mais tu ne la trouves pas , je vais te demander ce que tu cherches comme couleurs ou comme motif. Un client peut dire « je veux ce batik mais il est trop chargé. Je veux quelque chose de plus simple ». Je vais dire d’accord. Et je vais aller à l’atelier le créer. Puis la personne reviendra le chercher. Donc à chaque fois que quelqu’un vient au magasin, je discute beaucoup, je demande l’avis des gens et je le marque en mémoire. Plus tard je m’en rappelle et je sais que les gens peuvent vouloir ça.
Il faut évoluer. Donc tous les jours je dois me demander quoi faire. Je regarde autour de moi, peut-être en marchant, je regarde les jardins, je regarde les fleurs et je me dis « tiens, cette couleur est bien ! ».
Hugues
Donc tu t’inspires de tout ?
Esther
Oui ! Les poulets par exemple ! Ils ont de magnifiques couleurs ! Tu les regardes et en tires des couleurs très intéressantes auxquelles tu n’aurais même pas pensé. Nous créons les couleurs dont nous avons besoin.


Hugues
Et pour les tampons ?
Esther
Si j’ai quelque chose en tête j’appelle mon sculpteur et lui demande de modéliser le tampon.
Hugues
Donc tu ne sculptes pas le tampon toi-même ?
Esther
Non. Je sais le faire mais c’est beaucoup trop de travail. Il faut que quelqu’un soit tout le temps présent pour créer ce dont on a besoin.
Hugues
Donc cette personne sculpte uniquement pour faire le batik ?
Il sculpe uniquement pour moi.
Hugues
Pour toi seulement ?
Esther
Oui.
Hugues
Ah d’accord. Exclusivité !
[rires]
Esther
Voilà !
C’est comme ça qu’on fait notre batik. On s’inspire de tout. Les couleurs de ton visage, tes cheveux…
Hugues
Combien de personnes travaillent pour toi maintenant ?
Esther
4
Hugues
Et tu prévois d’agrandir ton affaire ?
Esther
Eh bien, quand j’ai commencé nous étions 15.
Hugues
Et que s’est-il passé ?
Esther
Le marché n’est plus comme avant, quand nous avons commencé. Les ghanéens portaient du batik, tout le monde en portait mais maintenant ils se retirent. Tu sais nous les ghanéens, on fait des choses pendant un certain temps puis on se lasse. On a besoin de changement. Les ghanéens ont besoin de nouveauté.
Donc maintenant je me concentre sur les expatriés.
Hugues
Et tu es contente de travailler avec PANAFRICA ?
Esther
Bien sûr ! [rires] J’étais très heureuse de vous être présentée. D’ailleurs je disais à tout le monde que je voulais faire grandir mon affaire, faire les choses en grand, pour que ma voix soit entendue.
Hugues
Donc c’était ton rêve, faire les choses en grand ?
Esther
Oui. Faire les choses en grand. C’est ça mon rêve.
Hugues
Pourquoi ? Pour tes enfants ?
Esther
Pour mes enfants, pour mes frères et sœurs, pour chaque personne autour de moi. Je pousse tout le monde autour de moi à travailler avec acharnement. Si tu ne travailles pas durement tu ne fais pas partie de moi car c’est ce en quoi je crois, travailler dur. Tout ce que j’ai accompli c’est le fruit d’un travail acharné.
Tu dois te rendre utile à quelque chose.
On espère que vous avez apprécié cette belle rencontre !